Histoire

Notre histoire et la grande Histoire

L’intention à l’origine de l’entreprise artisanale « Les Ateliers d’Art » TËSSS … est de soutenir un métier traditionnel en voie de disparition au Sénégal : le tissage mandjak.

Parmi tous les métiers traditionnels dont la technologie, adaptée aux conditions économiques et culturelles est la plus aboutie, le tissage mandjak nous est apparu au regard des étoffes de qualité produites, comme le plus convaincant et aussi le plus en danger. Les facteurs avec lesquels les tisserands ont à composer sont multiples : baisse de leurs revenus depuis la dévaluation (1994), augmentation du prix du coton, exode des apprentis vers des activités du bâtiment ou du transport en ville etc … Notre projet consiste à valoriser un atelier au sein de la ville de Saint-Louis du Sénégal : ville connue pour l’élégance et le raffinement de ses femmes, où les tisserands produisent toute l’année les étoffes de leur tradition pour en vivre. Nous commercialisons leur production et développons d’autres produits textiles  pour compléter notre offre au sein de la galerie.

Au 1er Janvier 2004 nous avons installé un tisserand et son assistant dans un espace loué pour l’activité. Nous avons ouvert un magasin à proximité immédiate et un atelier de couture pour présenter les étoffes dans leur format final à la clientèle européenne qui apprécie le produit dans une bonne présentation.

2004 présentation des pagnes tissés au SIAO (Ouagadougou). La clientèle recherche des produits artisanaux à bas prix. Notre présentation ne semble pas être à sa place dans ce salon.

2008 Exposition Pagnes … Panos … à Dakar, soutenue par le Service de Coopération culturelle de l’Ambassade de France au Sénégal.

2010 Exposition des Pagnes de collection, à Saint-Louis, au cours du Festival Mondial des Arts Nègres soutenue par le Comité Saint-Louis 350 et l'Institut Français de Saint-Louis.

Projet en cours :

  • Le Conservatoire des Arts et Métiers de l'Élégance avec l'association A.CAMÉE : implantation sur l'île de Saint-Louis du Sénégal

  • Notre exposition présentée dans les musées en France, à Lisbonne, à Salvador de Bahia.

Ils nous ont encouragé:

Dr en Philosophie, collectionneur, Duncan Clarke à Londres

Anthropologue Guy Massart Cap Vert - Bruxelles

Monsieur Hannes Hauser collectionneur à Vienne

Monsieur Wayne Barton collectionneur à Toronto

Historique

Les tisserands dans l’Afrique précoloniale ( comme aussi de nos jours) fournissaient aux villageois des bandes tissées sur des métiers chargés d’une chaîne de couleurs alternées. Les bandes rayées étaient assemblées par coutures ce qui donnait avec sept  bandes  longues de 1,80 m , un pagne.

Les étoffes étaient une monnaie d’échange. Roulées, sans être cousues elles faisaient partie des offrandes aux chefs aussi bien qu’aux défunts que l’on enroulait comme les momies égyptiennes. Les achats d’esclaves se sont produit aussi bien avec des échanges de verroteries, des perles dites « de traite » qu’avec des étoffes de belle facture. Il nous est apparu possible que connaissant la sensibilité des chefs pour ces étoffes en bandes, les "hommes d'affaires" se soient rapprochés des tisserands de la côte ouest africaine pour leur faire réaliser des bandes différentes : ornées richement. Ainsi, sous la direction des hommes dirigeant la traite seraient apparus les très ornés "pagnes MANDJAK"  (produit des tisserands de ce peuple de Guinée Bissau).

Les acteurs lusophones détenaient un pouvoir sur ces régions. Il nous semble possible que leur goût et leur savoir-faire aient été prégnants au point d’influer durablement sur la technique de tissage. Il était avantageux de produire localement une monnaie d’échange sans attendre l’approche des grands voiliers chargés des produits de troc.

Des liens se sont tissés entre les hommes du pouvoir blanc et des femmes des régions colonisées. Les mêmes étoffes chamarrées furent offertes aux dames séduites puis à leurs descendances métisses qui donnèrent de plus en plus le ton en matière de « mode ». Leurs belles manières devinrent avec le temps des rites : les coutumes évoluent ainsi. Penser aux SIGNARES de Saint-Louis du Sénégal. Beaucoup se demandent pourquoi, dans un pays où les derniers colons furent français, subsiste le terme « signares » pour désigner les élégantes métisses … la présence portugaise y fut importante et longue!

Avec ces acquis techniques, les africains au métier sont pour certains devenus des « génies » spécialement respectés dans la corporation. Pour appliquer les nouvelles techniques ils eurent besoin de mains supplémentaires pour la lève des lisses de motifs. Leurs apprentis ne comprenaient pas comment « montaient » ces motifs extraordinaires. Des rites complexes se sont ajoutés aux initiations spécifiques de la corporation.

Aujourd’hui encore beaucoup d’apprentis sont tenus en dehors du secret : n’est pas maître tisserand qui veut. Il faut une perspicacité et une intelligence hors du commun pour reproduire et créer un motif libre sans l’aide et les explications d’un pédagogue sans même les encouragements du maître. J’avance ceci  en me referant au témoignage d’un tisserand que j’ai interrogé : il explique que l’on est apprenti aussi longtemps que le veut le maître. Pour s’émanciper, lui même a dû se cacher pour observer les pratiques de son maître sans son assentiment. Il a pris plus tard le risque d’accepter une commande pour la réaliser sur son matériel personnel, et c’est à ce moment là seulement, à force d’acharnement qu’il a réussi à dépasser les obstacles et à construire son motif. Avec sa nouvelle liberté il n’est plus revenu vers son maître. Il a lui-même recours à un apprenti.